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L’ENGAGEMENT DE LA CAUTION

Si la proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut se déduire des revenus escomptés de l’opération garantie, il reste que les compétences professionnelles de la caution permettront de déterminer si celle-ci est avertie ou non.

La Cour de cassation a toujours considéré que le gain potentiel que la caution espère tirer de l’opération pour laquelle elle sollicite un prêt ne saurait servir pour caractériser la proportionnalité de son engagement. Cass com 27 janv 2015, n°13-27.625, Cass.com 22 sept 2015, n°14-22.913

Cette position permet de conformer les règles du cautionnement avec la réalité de la situation des cautions qui sont majoritairement des créateurs d’entreprises.

L’enthousiasme qui entoure la création de l’entreprise fait que les chances de réussite du projet ne sont pas toujours bien mesurées.

D’ailleurs, plusieurs entreprises sont mises en liquidation judiciaire quelques mois après leur création, ce qui vaut alors au gérant, caution solidaire, de devoir répondre des engagements pris.

La position de la chambre commerciale de la Cour de Cassation permet de limiter les arguments en faveur des banques, créanciers professionnels.

Reste maintenant que les banques exercent un devoir de mise en garde de la caution qui ne doit pas se limiter à de simples informations portées par la caution sur une fiche de renseignement.

La notion la « caution avertie » est une première réponse, mais elle est encore assez imprécise.

En effet, plusieurs jurisprudences assimilent la caution dirigeante d’une entreprise à une caution avertie, dès lors qu’elle a une véritable compétence professionnelle Cass com, 14 oct 2014, n°13-24.358,  Cass com, 28 janv 2014, n°12-27.703

Ou des compétences financières de base lui permettant d’apprécier le risque d’entreprise et l’opportunité d’un crédit ,CA Orléans, ch com 24 avr 2008, n°07/01015.

Il appartiendra donc au banquier de démontrer qu’il n’était pas tenu à un devoir de mise en garde, notamment parce que la caution était avertie.

La compétence professionnelle de la caution mériterait d’être clairement définie.

Cette compétence est-elle liée à sa qualité, si oui lesquelles, ou à ses fonctions, si oui lesquelles ?

Une première réponse est apportée par la Cour de cassation dans un arrêt (15-20.294) du 13 septembre 2017.

Pour la haute juridiction, si la caution doit démontrer la disproportion de son engagement par rapport à ses biens et revenus, la qualité de caution avertie ne peut se déduire de la simple référence à des compétences professionnelles qui doivent être spécifiées par les juges du fond qui ont, à ce titre, une obligation de motivation.

« Attendu que pour condamner Mme X… à payer à la banque la somme de 120 102,94 euros, outre intérêts, et rejeter ses demandes de dommages-intérêts fondées sur le manquement de la banque à son devoir de mise en garde, et de compensation, l’arrêt retient, par motifs adoptés, que Mme X…, attachée de direction, devait, au regard de ses compétences professionnelles, être considérée comme une caution avertie et qu’elle ne pouvait se méprendre sur ses obligations ;

Qu’en se déterminant par ces motifs qui, faute de préciser de quelles compétences il s’agit, sont impropres à établir que la caution était avertie, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

Il résulte donc que la compétence professionnelle de la caution devrait permettre de déterminer si elle est avertie ou non.

Reste que la question de la définition de la « compétence professionnelle » reste entière.

De toute façon, il appartiendra au juge de motiver sa décision.

Me Yves Léopold KOUAHOU

Avocat

Importance
Forte 91%